Un vaccin préventif et thérapeutique contre la maladie d’Alzheimer ?
Bien que la découverte peut se révéler prometteuse, l’heure est encore à la prudence et à la tempérance.
Après tous ces échecs, il est encore bien trop tôt pour crier victoire.
Se rapproche-t-on enfin d’un vaccin contre la maladie d’Alzheimer ? Testée sur des souris, une molécule nommée MPL a stimulé le système immunitaire des rongeurs qui a détruit 80 % des plaques séniles impliquées dans la démence. Le tout avec très peu d’effets secondaires, un contraste fort avec les anciennes tentatives.
La maladie d’Alzheimer est la principale cause mondiale de démence, et avec le vieillissement de la population, on estime que son incidence devrait fortement augmenter dans les décennies à venir. Pourtant, il n’existe aucun remède face à la maladie, ni même de traitement préventif.
Ce n’est pas faute d’avoir essayé. Au moins une douzaine de vaccins ont été testés ces dix dernières années, sans succès. Le dernier essai cliniqueen date revient à des chercheurs suédois du Karolinska Institut qui publiaient dans The Lancet Neurology des résultats mitigés. Si leur molécule, CAD106, stimulait bien les défenses contre les plaques séniles, agglomérats de bêta-amyloïdes impliqués dans la neurodégénérescence, les effets secondaires pour les patients étaient trop importants pour la grande majorité d’entre eux.
Les recherches continuent donc pour trouver le moyen de pousser les défenses de l’organisme à détruire ces plaques présentes entre lesneurones. Le problème ne vient pas de la synthèse des bêta-amyloïdes, mais plutôt d’un déficit dans leur élimination. Les cellules du système immunitaire du cerveau, les cellules microgliagles, ne parviennent pas à s’en débarrasser comme il faudrait.
Des plaques séniles en net recul
Après avoir essayé 25 molécules différentes pour stimuler la microglie, des scientifiques de l’université Laval (Québec), épaulés par le laboratoire GlaxoSmithKline (GSK), ont peut-être trouvé le composé qu’ils cherchaient. Leur expérience est décrite dans les Pnas.
Ce traitement repose sur une molécule appelée MPL, pour monophosphoryle lipide A. Elle est connue, car elle joue le rôle d’adjuvant dans certains vaccins développés par GSK, ce qui implique que son innocuité a déjà été prouvée chez l’Homme.
Les plaques séniles se forment entre les neurones à la suite d'une accumulation anormale de protéines bêta-amyloïdes mal formées.
Ces plaques sont caractéristiques de tous les patients atteints de la maladie d'Alzheimer, même si l’on ignore encore beaucoup sur leurs effets précis sur les neurones. Les cobayes n’étaient cependant pas humains. Des souris présentant une neurodégénérescence semblable à la maladie d’Alzheimer ont reçu par injection une dose hebdomadaire de MPL durant 12 semaines consécutives. À la fin du traitement, 80 % des plaques séniles avaient été éliminées. Les souris avaient aussi retrouvé la mémoire et obtenaient de meilleurs tests que les rongeurs non traités lors d’exercices d’apprentissage.
De faibles effets secondaires chez les souris avec le MPL
Les biologistes supposent que le MPL agirait à deux niveaux. D’une part, il augmenterait le nombre de cellules souches sanguines, celles qui se différencient en cellules de la microglie, élevant ainsi les effectifs du système immunitaire dans le cerveau. En plus, la molécule, en se fixant sur ces cellules, augmente leur appétit pour les plaques séniles, qui se trouvent mieux phagocytées.
Si d’un point de vue biologique les progrès sont incontestables, il faut prendre en compte en plus les effets secondaires lorsqu’on compte développer un vaccin. Contrairement aux précédents essais qui s’étaient montrés trop lourds de conséquences, l’inflammation constatée semble cette fois nettement plus modérée. De quoi supposer que le traitement serait bien supporté par les sujets humains à des doses équivalentes.
MPL, le vaccin thérapeutique et préventif contre Alzheimer ?
De la théorie à la pratique, il y a encore beaucoup de paliers à franchir. Les auteurs espèrent entamer les essais cliniques prochainement, le laboratoire GSK devant bientôt les annoncer.
L’idée serait de l’utiliser de deux façons différentes. Le MPL constituerait d’une part un vaccin thérapeutique pour les patients atteints par la maladie d’Alzheimer en augmentant la réponse des cellules de la microglie aux plaques séniles, permettant de ralentir la progression de la neurodégénérescence. D’autre part, il pourrait aussi constituer un bon vaccin préventif pour les personnes à risque de déclarer la démence par stimulation de la réponse immunitaire contre les bêta-amyloïdes.
Merci de poursuivre la suite de cet article écrit par Janlou Chaput, Futura-Sciences