J’aime les très vieux
Assis à la fenêtre
Qui regardent en souriant
Le ciel perclus de nuages
Et la lumière qui boite
Dans les rues de l’hiver
J’aime leur visage
Aux mille rides
Qui sont la mémoire des mille vies
Qui font une vie d’homme
J’aime la main très vieille
Qui caresse en tremblant
Le front de l’enfant
Comme l’arbre penché
Effleure de ses branches
Le sommeil d’une rivière
J’aime chez les vieux
Leur geste fragile et lent
Qui tient chaque instant de la vie
Comme une tasse de porcelaine
Comme nous devrions faire nous aussi
À chaque instant de la vie.
Jean-Pierre Siméon
Jean-Pierre Siméon est né en 1950.
Il a enseigné longtemps à l’IUFM de Clermont-Ferrand et a été à l’origine de La Semaine de la poésie, qui s’y déroule maintenant chaque année.
Une semaine ou des poètes vont dans des classes pendant la journée et donnent des lectures en soirée. Il est le directeur artistique du Printemps des Poètes.
Il a publié de nombreux livres et a reçu le prix Antonin Artaud et le prix Apollinaire. Il a écrit aussi plusieurs réflexions sur le théâtre et la poésie aujourd’hui, réflexions qui interrogent par exemple le rapport du poème au monde, les mille lectures possibles d’un texte poétique, et les moyens à inventer et/ou à éviter pour que ces textes puissent rencontrer le plus de gens différents. Une vie engagée donc, au service de la poésie pourrait-on dire. Une écriture au service de la vie, de l’humanité dans l’humain… quelque chose comme ça. Révoltes contre les violences inacceptables du monde, les mots de Jean-Pierre Siméon sont résolument tournés vers l’autre, ouverts grands comme des bras qui voudraient ne rien exclure du vivant et qui seraient comme le geste d’enlever un bâillon sur une bouche.
(Source Web.)
Je remercie Madeleine G. (89 ans) de Bruges, qui m’a confié ce poème et suggéré d’en faire «quelque chose» pour mon site!